Et le terme incarnationis ? Toujours selon le dictionnaire latin-français de Félix Gaffiot, incarnationis est un terme se rapportant exclusivement à la religion. Incarnationis se traduit par « incarnation ». Existe-t-il un lien entre incarnationis et l’Empire romain ? Les empereurs peuvent-ils être des seigneurs incarnés ? Nous remarquons qu’Auguste a divinisé Romulus, le fondateur de Rome. Ainsi, faudrait-il lire anno ab incarnationis domini comme « année de l’incarnation de notre seigneur » ... Romulus ? Auguste a-t-il imposé le culte de la Rome incarnée dans la personne sacrée de l’Empereur ? C’est une possibilité...
Une autre hypothèse : le terme incarnationis serait à mettre en relation avec celui d’imperium. Imperium signifie « pouvoir, pouvoir suprême » puis devient synonyme d’« empire » et de « gouvernement impérial ». Le site « Histoire critique du christianisme romain » remarque que le Pape « fixera l’origine de sa puissance à la date de l’accession de son dieu à l’Imperium, c’est-à-dire à la date de son Incarnation supposée ». Il pourrait donc bien exister un lien entre « Empire » et « Incarnation »...
Jésus Christ dans la datation
Et Jésus-Christ dans tout cela ? Quand apparaît-il dans la datation ? Si nous suivons le cours de l’Histoire officielle, c’est le moine Denis le Petit qui instaure donc l’ère chrétienne et propose le terme de datation suivant : Anno domini nostri Jesus Christi. Comme le pape Jean II adopte cette nouvelle datation en 533, nous pourrions nous attendre à voir Jesus Christi apparaître conjointement à la datation anno ab incarnationis domini. Eh bien, non !
Nous savons donc que la datation anno domini apparaît au plus tôt vers 726-730. Cependant, elle ne commence à se généraliser qu’à partir du milieu du Xème siècle, vers 960. Et en France, toujours selon l’article « la datation dans les inscriptions médiévales françaises », l’expression anno ab Incarnatione domini ( nostri ) Jesu Christi n’apparaîtrait au plus tôt qu’en 990, et encore, n’est-elle que très rarement utilisée. Ainsi, il y aurait au minimum plus de 250 ans d’écart entre l’apparition de la datation anno ab incarnationis domini et celle d’anno domini Jesu Chisti ! Et entre l’acceptation de l’ère chrétienne par Jean II et son application dans la datation, l’écart serait de plus de 450 ans !!!
450 ans !!! Cherchons l’erreur... Nos historiens de la Renaissance auraient-ils pu supposer à tort qu’anno Incarnationis domini faisait directement référence à Jésus Christ, alors que la mention Jesu Christi est très postérieure à l’apparition de la datation anno domini ? Pour répondre à cette question, il faut se demander quand le christianisme apparaît dans l’Empire romain. Et pour cela, il va nous falloir en apprendre un peu plus sur la religion romaine...
Le culte de Mithra
A Rome, donc, les dieux vénérés sont tout d’abord Jupiter, Apollon, Mars, Bellone, Minerve, Bacchus etc. Mais à la fin de la République et au début de l’Empire, les cultes venus d’Orient s’imposent de plus en plus face aux dieux gréco-romains. Le plus populaire est celui de Mithra, le dieu soleil. Sous Tibère, on ne dénombre pas moins de 45 sanctuaires dédiés à Mithra dans Rome. Et au IIème et IIIème siècle, ce culte s’est répandu dans tout l’ouest de l’Empire, de la Bretagne au Danube. Mithra est un culte venu de Grèce et très populaire dans l’armée romaine car il parle d’une vie après la mort. Les principes rituels de ce culte ? Le baptême par immersion et un échange de pain et de vin. Les lieux de culte ? Principalement des grottes ou des temples reproduisant une grotte. Curieusement, nos églises romanes sombres nous font beaucoup penser aux temples dédiés à Mithra... De là à penser que nos églises romanes étaient en fait originellement des temples dédiés à Mithra... Selon notre datation synchronisée, cette hypothèse serait bien possible...
Le culte de Sol Invictus
Pour le culte de Mithra, la date la plus importante dans le calendrier romain est le 25 décembre, le jour de la renaissance du soleil. Mithra s’est peu à peu substitué à l’ancien culte gréco-romain du dieu Hélios-Sol. D’ailleurs le mot « noël » est un dérivé de « néo Hélios », le nouveau soleil. Mais à partir du IIIème siècle, un nouveau dieu apparaît dans l’empire romain, Sol Invictus, Soleil Invaincu. Ce culte reprend des aspects du culte de Mithra et d’Apollon, et se développe principalement dans l’armée romaine. L’empereur Aurélien ( 270-275 ) proclame Sol Invictus patron principal de l’Empire romain, et fait du 25 décembre une fête officielle en 274 ( 1027 AUC ). Il fait construire un nouveau temple à Rome et crée un collège de pontifes spécialement pour Sol Invictus. Avec Aurélien, et la crise qui sévit dans l’Empire suite aux invasions barbares ( la fameuse peur de l’an mil ? ), l’autorité de l’Empereur et sa légitimité sont renforcées. Aurélien se proclame deus, divin, et ses monnaies portent l’inscription deus et dominus natus, dieu et maître.
Les réformes de Dioclétien
Avec l’empereur Dioclétien ( 284 - 305 ), la sacralisation de l’Empereur se poursuit. L’empereur se fait désormais couramment appeler Dominus, se coiffe d’un diadème et d’un manteau richement brodé, et impose en 291 ( 1044 AUC ) le rite de la génuflexion. Comme l’Empire devient de plus en plus difficile à diriger, les provinces sont morcelées et passent de 47 à 85. Les nouvelles provinces sont regroupées en douze diocèses gérés par des vicaires, recrutés dans l’ordre équestre et dépendant uniquement de l’empereur. Les vicaires ont de grands pouvoirs : ils jugent, contrôlent les gouverneurs, repartissent les impôts. Par contre, ils n’ont aucun commandement militaire. Dioclétien sépare les carrières civiles et militaires. Mais Dioclétien est surtout connu pour sa grande persécution contre les manichéens ( en 297 - 1050 AUC ) et les chrétiens ( 303 - 1055 AUC ) qui ne sacrifiaient pas aux dieux de l’Empire. En Orient, ceux qui ne sacrifient pas risquent la peine de mort. Cependant, nous avons observés que les rites de Sol Invictus sont totalement similaires à ceux du christianisme. Alors.. ? Voyons tout d’abord qui sont les manichéens. Pour eux, le monde se divise en deux, le Bien et le Mal, et les deux doivent se combattre. Les manichéens pratiquaient des périodes de jeûne, le célibat et les « élus » passaient leur temps à prêcher. Seuls les « élus » étaient assurés d’atteindre le Royaume de la Lumière après leur mort. Pour Dioclétien, ces persécutions visaient surtout à maintenir la cohésion des légions, ainsi que celle de la société romaine, et la présence d’objecteurs de conscience ne pouvait plus être tolérée. Et les chrétiens, qui sont-ils ?
Qui sont les chrétiens ?
En - 71 ( 682 AUC ), le général Marcus Licinius Crassus réprime cruellement la révolte des esclaves menée par le gladiateur Spartacus. Spartacus, ou du moins son principal lieutenant ( le gladiateur serait mort en combattant Crassus ), est crucifié avec ses 6 000 compagnons sur la Via Appia, de Rome à Capoue. L’exemple est terrible et frappe durablement l’esprit des esclaves. Plus aucune révolte servile d’importance n’aura lieu dans l’Empire romain. Cependant, sous Auguste, les esclaves de sa nouvelle administration travaillant à Alexandrie découvrent la Septante gréco-latine.
Depuis Spartacus, beaucoup n’avaient que l’esclavage à vie pour seul horizon et rêvaient d’un « jugement dernier » où l’oppresseur romain recevrait enfin ce qu’il méritait... En découvrant l’Ancien Testament, les fonctionnaires d’Auguste découvrent un livre qui leur parle. Ils trouvent dans ces lignes un grand écho aux souffrances qu’ils endurent, et à leur espoir d’une vie meilleure dans un autre monde. Et ils vénèrent désormais le dieu unique en opposition aux dieux romains. Et surtout, l’Ancien Testament précise leur identité de personnes humiliées ayant faim de revanche. Petit à petit, l’Ancien Testament se répand dans le milieu de l’administration romaine, et plus encore à Rome. La Septante devient ainsi le manifeste de référence des esclaves et de tous ceux résistant à l’oppresseur romain.
Sous l’empereur Claude ( 41-54 ou 794-807 AUC ), un agitateur appelant à la révolte s’appelait Chrestos, et beaucoup d’esclaves d’origine juive étaient dans son groupe. Les compagnons de Chrestos se font rapidement appelés les chrétiens. Sous Trajan ( 98-117 ou 851-870 AUC ), cette appellation caractérisait toute personne opposée à l’ordre romain. Et être chrétien était passible de la peine de mort. Dans ce contexte, il est plus que logique que Dioclétien persécute les chrétiens puisque ceux-ci prônaient la révolte et la sédition à l’Empire Romain !
Constantin ou la consécration du Christ
L’empereur Constantin ( 306-337 ), après sa victoire à la bataille du Pont Milvius sur Maxence en 312 ( 1065 AUC ), change complètement le visage de l’Empire romain. A la suite de sa victoire, il fait apposer sur le bouclier de ses légionnaires, le chrisme, son nouveau symbole, formé des deux lettres grecques Khi ( X ) et Rho ( P ), les initiales du mot Christos, signifiant « oint de Dieu », « qui a reçu l’onction sainte de Dieu ». Par la suite, le chrisme devint le symbole des légions romaines. En 313 ( 1066 AUC ) Constantin promulgua l’édit de Milan, autorisant la liberté de culte à tous les citoyens de l’Empire. Nos chrétiens, les ennemis de l’Empire, peuvent désormais librement pratiquer leurs assemblées et les traductions de la Septante en latin se multiplient. Constantin, en prônant la concorde dans l’Empire autour du dieu unique, fait ainsi taire toutes les séditions. En 321 ( 1074 AUC ), Constantin impose le repos dominical, sous le nom de « Jour vénérable du Soleil ». Sol Invictus était donc encore le culte de l’Empire... En 324 ( 1078 AUC ), Constantin installe sa capitale en Orient dans la ville de Byzance, et la rebaptise Constantinople.
Le Concile de Nicée
En 325 ( 1079 AUC ) a lieu le concile de Nicée. Selon la Tradition, à l’issue de ce concile, Constantin et sa nouvelle église ( du latin ecclesia = assemblée ) assimilèrent les principes monothéistes des manichéens et des chrétiens au culte de Sol Invictus et créa la nouvelle religion ( du latin religio = respect, culte, vénération ) du Christ-Empereur, fils du dieu unique. D’après le site « Histoire critique du christianisme romain » : « La religion chrétienne se christianisa et devint donc religion grecque ( ô christianismos ) c’est-à-dire culte de Constantin, unique représentant du Dieu Unique dans son Empire en voie d’unification. Cela rappelait à la mémoire des érudits le culte promulgué autrefois à la gloire d’Alexandre le Grand ». Plus surement, le Concile de Nicée, soit l’assemblée de l’Empereur, établit le nouveau dogme officiel de l’empire romain : le culte du Christ-Empereur en remplacement de Sol Invictus. La construction des basiliques, les maisons de l’Empereur dédiées au Christ, mais servant aussi de tribunal, de lieu de commerce, de promenades, d’assemblée, etc. se multiplient dans tout l’Empire. Une curiosité est à remarquer.
Elle est soulignée par le site « Histoire critique du christianisme romain » : « Eusèbe de Césarée, par sa " Vie de Constantin " contribua beaucoup à la déification de celui-ci qui jusqu’à la fin de la période romane du Moyen Age ( 12ème siècle ) fut honoré par les fidèles comme le fondateur de l’Eglise catholique. De nombreuses églises romanes, en Poitou Charente, Alpes de Provence etc., portent au-dessus de leurs porches, par où les foules circulaient, d’imposantes statues équestres appelées des " Constantin ", auxquelles Emile Male a consacré dans son " Art religieux du 12ème siècle en France ", des pages d’une érudition émue ». Jusqu’au XIIème siècle ! Constantin serait donc honoré par l’Eglise chrétienne pendant prêt de 800 ans ! Ne semble-t-il pas plutôt évident que les églises romanes ont été dédiées à Constantin car elles ont été construites à son époque ? Et qu’il faudrait donc bien superposer le calendrier chrétien au calendrier romain ?
Ainsi, si Constantin s’assimile à Jésus-Christ, il est normal d’avoir un décalage dans la datation entre anno ab incarnationis domini et anno domini nostri Iesu Christi, car 350 ans, du règne d’Auguste à celui de Constantin, les séparent !
Concernant l’assimilation de Christi à Iesu, soit Jésus est effectivement le nom du sauveur chrétien, soit Iesu signifie tout simplement « Dieu unique » et anno domini nostri Iesu Christi signifie « année de notre maître oint du dieu unique »...
Le 25 décembre 335 ( 1088 AUC ), à Rome, la fête de Sol Invictus change officiellement de dénomination, pour devenir celle de Christ, oint du dieu unique. Les rites de célébration ne changeaient pas, seule l’appellation change.
Le mythe de la croix
Le symbole de la croix est un rite très ancien. Il est tracé en signe de protection, puis sur le front lors du baptême. Ensuite, trois versions s’affrontent. Selon la première, le premier symbole des chrétiens était le poisson, car en grec « poisson » s’écrit IXΘYΣ, ou ichthus, dont les lettres constituent les premières lettres de Iêsous Christos Theou Uios Sôtêr, c’est-à-dire Jésus Christ, Fils de Dieu et Sauveur. Selon la seconde version, le chrisme de Constantin devient le symbole officiel de l’Empire romain et s’impose partout dans le paysage. Selon la troisième version, comme Spartacus est devenu le symbole de la lutte contre l’Empire romain, et que ses partisans ont tous été crucifiés par Crassus sur la voie Appienne, ce serait pour cette raison que le symbole de la croix a été adopté par les chrétiens...
En 324 ( 1078 AUC ), Constantin décide de construire sa nouvelle capitale de son empire sur le site de la ville grecque de Byzance, réputée imprenable. Il la baptisera la « Nouvelle Rome » car il la construit autour de sept collines avec un forum, un Capitole, un sénat, un palais, un hippodrome et la basilique dédiée à la Sagesse Sacrée. La ville est inaugurée en 330 ( 1084 AUC ). Dans le même temps à Rome, Constantin fait bâtir une nouvelle basilique sur l’emplacement du Circus Vaticanus, le cirque de Caligula. L’Empereur quitte donc l’Occident et Rome pour s’installer en Orient. De tout l’Occident, les pèlerins vont affluer à Constantinople pour voir la ville, aller siéger au sénat, ou rencontrer l’Empereur. Les pèlerinages, du latin peregrinatio, qui signifie voyage ou séjour à l’étranger, vont se multiplier. Dans tout l’Empire, se développe un nouvel ordre qui va profiter de la division entre l’Orient et l’Occident et convoyer les voyageurs : les Templiers.
La fin du paganisme
Selon la Tradition, la mère de Constantin, Hélène, lors d’un séjour à AElia Capitola, Jérusalem, en 326 ( 1080 AUC ) aurait découvert la vraie croix de Jésus lors de la construction de la basilique ordonnée par son fils sur l’emplacement d’un temple dédié à Vénus construit par l’empereur Hadrien. Cependant, ces récits n’apparaissent qu’à partir des années 370 ( 1120 AUC )... En tout cas, c’est à partir de cette époque que le mot martyrium ( = lieu où un martyr est enseveli ) se généralise et désigne une église basilicale contenant une relique. De même, c’est à cette époque que le paganisme tend à disparaître sous la volonté des empereurs. Ainsi, l’Empereur Constant II proclame en 357 ( 1110 AUC ) un édit de persécution contre les païens : « Nous décrétons la peine capitale contre ceux qui sont convaincus d’adorer les idoles ».
Les croisades
Le terme « croisade » provient de l’adjectif crucesignatus, croisé ( littéralement, marqué par la croix ) ou du verbe crucesignare, prendre la croix. Le terme « croisade » n’est pas employé avant le milieu du XIIème siècle. C‘est le terme « voyage à Jérusalem » ou « pèlerinage » qui est utilisé, ainsi qu’ « aide à la Terre Sainte ». Du point de vue musulman, les croisades sont perçues comme la continuation de la lutte contre l’Empire romain d’Orient. La Terre Sainte est-elle l’empire romain d’Orient ?
En 1095 ( AD ), au concile de Plaisance les ambassadeurs de l’empereur byzantin réclament aux Occidentaux une assistance militaire. Les chevaliers d’Occident s’engagent donc à délivrer l’Empire des « païens ». Ils prennent la croix au nom de l’Empereur, et deviennent les cruce signati. En 1097 ( AD ), tous arrivent à Constantinople et s’unissent pour prendre Jérusalem en 1099 ( AD ). Un royaume est créé. Que se passe-t-il à Jérusalem ? En construisant une basilique impériale, des fragments de croix sont trouvés et établissent sans doute le mythe fondateur du Christ mort sur la croix. De même, l’Ancien Testament étant originaire de Palestine, c’était aussi la Terre Sainte de tous les chrétiens, la terre originelle du dieu unique. A partir de ce moment, les reliques dites de la Vraie Croix, ainsi que les pèlerinages vont se multiplier.
Les Templiers
En 1120 ( AD ), la milice des pauvres chevaliers du Christ et du Temple de Salomon est créée. Ces chevaliers arborant le chrisme ont pour mission de sécuriser les voyageurs à destination de l’Orient. Le roi Baudouin II leur octroya une partie de son palais de Jérusalem, à l’emplacement du Temple de Salomon qui donna par la suite le nom de Templiers ou de chevaliers du Temple.
Théodose ou l’Inquisition
L’Empereur Théodose ( 376-395 ou 1129-1148 AUC ) radicalise totalement la religion. En 380 ( 1133 AUC ), il proclame l’édit de Thessalonique dans tout l’Empire : « Nous voulons que tous les peuples que régit la modération de Notre Clémence s’engagent dans cette religion que le divin Pierre Apôtre a donné aux Romains - ainsi que l’affirme une tradition qui depuis lui est parvenue jusqu’à maintenant - et qu’il est clair que suivent le pontife Damase Ier et l’évêque d’Alexandrie, Pierre, homme d’une sainteté apostolique : c’est-à-dire que, en accord avec la discipline apostolique et la doctrine évangélique, nous croyons en l’unique Divinité du Père et du Fils et du Saint-Esprit, dans une égale Majesté et une pieuse Trinité.
Nous ordonnons que ceux qui suivent cette loi prennent le nom de Chrétiens Catholiques et que les autres, que nous jugeons déments et insensés, assument l’infamie de l’hérésie. Leurs assemblées ne pourront pas recevoir le nom d’églises et ils seront l’objet, d’abord de la vengeance divine, ensuite seront châtiés à notre propre initiative que nous avons adopté suivant la volonté céleste ». Le paganisme est définitivement proscrit. Ainsi, des bataillons de moines illettrés, vêtus de noir, tuèrent sous les ordres des évêques, brulèrent maisons et bibliothèques dans leur haine des anciens dieux, de tout ce qui est hostile à l’empereur, et même des philosophies platoniciennes ( sur ce sujet, R. Mac Mullen, Christianisme
et paganisme du IVème au VIIIème siècle ). Peut-il exister deux périodes d’Inquisition et d’hérésie ? L’inquisition de Théodose n’est-elle pas exactement la même que celle qui sévit au Moyen Âge ?
Le bas Empire
En 395 ( 1148 AUC ), l’empire romain se sépare définitivement entre Orient et Occident. Et l’Occident ne peut plus se maintenir face à la nouvelle vague d’invasion. En 407 ( 1160 AUC ), l’armée romaine évacue définitivement la Bretagne. Les Wisigoths mettent à sac Rome en 410 ( 1163 AUC ). En 451 ( 1204 AUC ), Aetius bat les armées d’Attila. En 476 ( 1229 AUC ), l’empire romain d’occident disparaît définitivement. Rome n’est plus que l’ombre de son passé glorieux, mais des combats sont toujours donnés dans les Arènes...
Le flou des années 530-600
Selon les sources, plusieurs épidémies de peste se succèdent suite à l’impact de la météorite datée à 535 ( 1288 AUC ). Ainsi, près de 50 années se seraient écoulées entre l’apparition de la peste en Egypte en 541 et à Rome en 590. Or, cette épidémie est simultanée et s’est propagée très rapidement. Dans ce laps de temps, Rome serait prise par les ostrogoths en 537, qui auraient achevé la ville antique en détruisant les aqueducs. Sans doute faut-il situer l’impact plutôt vers 1343 AUC.
Le cataclysme marque les esprits
Lorsque le cataclysme s’abat sur l’Empire, celui-ci fonctionne encore très bien et les édits de l’empereur Justinien sont appliqués même en Occident. Et puis, subitement, la terre se met à trembler et tout s’écroule, des raz-de-marée détruisent les côtes, et même Rome est touchée par le débordement du Tibre. A cela s’ajoute un ciel qui s’obscurcit durablement, des récoltes qui ne poussent pas, le froid qui s’installe sur un monde sans soleil. Les épidémies se propagent. C’est la peste de Justinien en Orient et la Peste Noire en Occident. Et surtout, la catastrophe s’inscrit dans la durée, pour une période de 7 à 15 ans ! Si l’impact de la catastrophe laisse un empire romain en ruine, sur les consciences, l’effet est encore plus dramatique. Tous croient quela fin du monde est arrivée et le monde entier se met à prier. Ainsi, les populations prient ardemmentpourque le soleil revienne dans le ciel, pour que les récoltes soient bonnes, bref, pour qu’elles soient sauvées !
Et si les hommes meurent, ils doivent prier davantage encore pour obtenir leur place au paradis, loin de cette terre de souffrance. Et si une catastrophe s’est ainsi abattue sur les hommes, c’est à cause de leurs pêchés ! Cette période de ferveur mystique va durablement s’installer car, après le cataclysme, les choses ne reviennent pas à la normale. Le temps reste froid et la peur s’est installée. La peur que le cataclysme ne revienne, que la fin du monde soit proche...
Rome post-impact
« Des ruines sur des ruines » se désole le pape Grégoire. En effet, Rome a déjà été très touchée par les mises à sac successives des Wisigoths et des Ostrogoths. Plusieurs bâtiments sont à l’abandon et la population est moins importante depuis que Rome n’est plus la capitale de l’Empire. Ajoutons là-dessus un tremblement de terre et un raz-de-marée venu du Tibre et nous obtiendrons le triste spectacle que Grégoire avait devant les yeux : des ruines sur des ruines. Sans oublier l’épidémie de peste qui s’abat sur les survivants. Rome devait alors ressembler à une ville fantôme... Grégoire Ier, pape ou préteur urbain, de 590 à 604 ( 1343 à 1357 AUC ) est en charge de la ville après l’épidémie de peste, et organise la vie « post-impact ». Il établit un système juridique, veille à l’approvisionnement de la ville et à l’entretien des services vitaux. Les abris pour les pauvres, l’assistance aux malades sont assurés par les diacres. A la suite du cataclysme, Rome change de physionomie. Les églises et les monastères se multiplient en cette période de ferveur mystique et se construisent sur les anciennes domus des grandes familles. Le Panthéon est converti en église en 609 ( 1362 AUC ). Bref, la Rome antique a définitivement cessé d’exister...
Christianisme ancien ou moderne ?
François de Sarre estime que le christianisme moderne s’est mis en place suite à cette catastrophe et non à partir de Constantin ou de Théodose. Que seul un cataclysme de cette ampleur pouvait permettre la mise en place d’une société uniquement basée sur la prière et sur la peur. Que le « sauveur » Jésus-Christ a été inventé par la papauté d’Avignon. En effet, les papes, ou pontifex maximus ( l’Empereur Gratien a abandonné ce titre en 382 ( 1135 AUC ) en vertu de mesures prises contre les religions anciennes ) quittent Rome et viennent s’installer à Avignon. En 1305 ( AD ), le pontife Clément V est couronné à Lyon, curieusement encore nommée capitale des Gaules et refuse de s’installer à Rome. A cause du cataclysme ou des invasions barbares ? Sans doute plutôt à cause des invasions barbares... Il ne nous semble pas que le christianisme catholique se soit mis en place après le cataclysme, car Théodose parle bien dans ses édits de notre religion moderne. Cependant, les termes de l’édit de Théodose pourraient être trompeurs. En effet, si catholicus signifie « universel » en latin, catholiciani est le nom donné aux agents impériaux dans les provinces selon le code Justinien ! Alors le doute peut subsister...
La Pâques chrétienne
Si la fête la plus importante de l’Empire Romain était le 25 décembre, jour de la renaissance du soleil, une autre fête était tout aussi importante : celle de Pâques. L’origine de cette fête est aussi très lointaine. En effet, Pâques, avant le christianisme moderne, était le jour de la célébration de la déesse de la fertilité, Déméter chez les Romains. Cette fête symbolisait la résurrection de la vie, l’arrivée du printemps après l’hiver. Et ce jour était fixé selon les cycles lunaires. Selon notre christianisme moderne, c’est Denis le Petit, dans son livre le Liber de Paschate, qui rapporte que c’est le Concile de Nicée qui a fixé pour de bon le mode de calcul de la date de Pâques : « Pâques est célébrée le dimanche qui suit le quatorzième jour de la Lune qui atteint cet âge au 21 mars ou immédiatement après ». Le christianisme moderne, outre le fait qu’il cale la résurrection de Jésus-Christ sur la fête de Déméter, inclut les principales fêtes païennes dans sa doctrine : Jésus-Christ naît avec le cycle solaire et ressuscite au printemps...
La fête de Pâques est-elle devenue la plus importante de l’année après le cataclysme ? En effet, nous pouvons nous poser la question, dans la mesure où le cataclysme s’est inscrit dans la durée, qu’il a voilé le soleil pendant 18 mois au minimum, et que les récoltes ont été mauvaises pendant prêt de sept ans. Or, pour toutes les populations frappées durement par un cataclysme, l’important est de pouvoir assurer le ravitaillement en eau et en nourriture. Si, avec de la chance, l’eau n’était pas polluée par les pluies rouges, les céréales, elles, ne poussaient pas. D’où la grande importance de prier la déesse de la fertilité pour obtenir de bonnes récoltes ou... Jésus-Christ pour qu’il ressuscite et sauve les hommes de leurs pêchés.
Ainsi, il était très important pour l’Eglise catholique de pouvoir fixer correctement la date de Pâques, comme fête de la reprise normale du cycle des saisons après le cataclysme, ou fête de la résurrection de Jésus-Christ. Le livre fondateur du calcul de la Pâques moderne est donc le Liber de Paschate. Officiellement, il est daté de 525 après Jésus-Christ. Et c’est à partir de ce livre que toute notre chronologie moderne est établie.
Auguste ou l’an 0 de notre chronologie moderne
Le Liber de Paschate se base sur les années dioclétiennes. En années depuis la fondation de Rome, Dioclétien arrive au pouvoir en 1038 ( 285 après Jésus-Christ ). Et les tables du calcul de la date de Pâques que Denis avait en sa possession s’arrêtaient 247 ans plus tard, soit en 1285 AUC ( ou 532 après Jésus-Christ ). Lorsque Denis invente l’ère chrétienne, on peut se demander pourquoi il ne l’a fait pas démarrer au Concile de Nicée ce qui aurait été assez logique puisque le Concile marquait le point de départ du christianisme moderne. Sans doute n’en connaissait-il pas la date... Alors, comment fait-il ? A-t-il cherché dans les archives de Rome les documents ou apparaissaient pour la première fois anno domini ? Pourquoi n’a-t-il pas abouti à l’an 726 ou 730, au début du règne ou de l’administration d’Auguste, véritable an 0 de notre ère moderne ? Est-ce parce qu’en 751 AUC Auguste a reçu du sénat le titre de « père de la Patrie » ?
La renaissance de Rome
En 1377 anno domini, les papes quittent Avignon et Grégoire XI est de retour à Rome. Une remarque : en datation synchronisée, Grégoire Ier reste pontife à Rome jusqu’en 1357 AUC. Grégoire Ier et Grégoire XI peuvent-ils être la même personne ? Après une période d’errance, le pape Martin V s’installe définitivement à Rome en 1420 anno domini. Martin V découvre une ville... en ruine et lance une grande campagne de restauration des routes, des églises et des palais. En effet, la Rome du Moyen Âge aurait végété sur ses bâtiments antiques en ruine pendant près de... 900 ans !!! Martin V organisa même un jubilé en 1423 pour célébrer la renaissance de la ville !
L’invention du Moyen Âge
Dans quel état se trouve Rome au retour des papes ? En 1430, Poggio Bracciolini escalade la colline du Campidoglio ( Le Capitole ) et ne voit autour de lui qu’une étendue de champs abandonnés. Il s’agissait du forum romain, désormais peuplé de cochons et où croissait librement la végétation. Bracciolini deviendra un an plus tard le secrétaire particulier du pape Eugène IV ( 1431-1447 ). Après lui, Flavio Biondo ( 1392-1463 ), secrétaire des papes Eugène IV, Nicolas V, Calixte III et Pie II, commença avec quelques autres à étudier l’architecture, la topographie et l’histoire de la Rome ancienne, soit en recherchant de la documentation chez les auteurs classiques, soit en explorant les vestiges. En 1459, il publie Les triomphes de Rome, histoire de la Rome païenne, érigée en modèle de gouvernement et d’organisation militaire. Le livre eut une grande influence et insuffla le patriotisme et le respect pour la Rome ancienne, tout en présentant la papauté comme la continuation de l’empire romain. Quant au terme « moyen âge », Flavio Biondio l’utilisa pour la première fois dans son livre Historiarum ab inclinatione Romanorum Imperii, Décades historiques depuis la fin de l’empire romain, sous l’expression « medium aevum ».
L’invention de l’ère romaine
Et si plutôt que de parler de l’invention de l’ère chrétienne, il fallait surtout parler de l’invention de l’ère romaine ? Comment en est-on venu à séparer les ères Ab Urbe Condita et anno domini ? Est-ce à cause du Liber de Paschate de Denis le Petit ? De l’Histoire écclésiastique de Bède le Vénérable ? Nous remarquons que dans son livre, Denis le Petit ne cite pas une fois la date 753/754 du calendrier romain ! Et Bède le Vénérable ne relie jamais anno domini et ère chrétienne ! Alors, qui a fait l’erreur ? Est-ce le pape Martin V lorsqu’il lance le programme de restauration de Rome ? Un indice nous est donné par Iiro Kajanto dans son article « Dating in the Latin inscriptions of medieval and Renaissance Rome » : la datation « classique » à Rome, c’est-à-dire Ab urbe Condita, réapparaît, ou plutôt apparaît, à partir de 1430.
Or, que se passe-t-il en 1430 à Rome ? Les premiers archéologues, qui sont aussi les secrétaires du pape, découvrent une Rome en ruine. En voyant la voyant la ville dans un tel état, ils ont du penser qu’elle était très âgée. C’était en partie vrai. Beaucoup des bâtiments qu’ils avaient devant les yeux devaient avoir plus de 500 ans. Comme Grégoire Ier, ils avaient devant les yeux « des ruines sur des ruines », mais désormais les ruines étaient recouvertes de végétation. Pour cette génération post-cataclysme, tout devait apparaître à leurs yeux comme si l’Empire romain avait disparu il y a 1 000 ans, et non pas 100 ans...
Les secrétaires du pape, qui ont tenté de reconstruire l’histoire de la Rome antique, sont tombés pendant leur recherche sur d’anciens manuscrits avec des datations différentes : l’une apparaissait datée en Ab Urbe Condita et l’autre en anno domini. Pour eux, ils ne pouvaient s’agir de la même datation, l’Empire romain apparaissant beaucoup trop âgé pour eux. Et pour cause : la ville qu’ils avaient devant les yeux était âgée de plus de 1 200 ans. Ainsi, lorsqu’ils ont écrit leur histoire du Moyen Âge depuis la fin de l’Empire romain, ils ont involontairement séparé les dates Ab Urbe Condita et anno domini. Tout ce qui se rapportait à l’Empire Romain était daté selon les consuls ou les règnes de l’Empereur, et tout ce qui était anno domini se reportait à l’ère de Jésus-Christ. Et c’est à la suite de leurs observations et de leurs publications, et donc de leur erreur, que les érudits, hommes d’église et laïc confondus, ont tenté d’adapter l’Histoire à cette nouvelle chronologie.
Une accumulation d’indices
Serions-nous donc en 2010 après la fondation de Rome ? Résumons les indices accumulés :
•La Peste Noire et la Peste de Justinien se superposent presque parfaitement si nous superposons les calendriers romain et chrétien.
•Il existe un décalage de 200 ans entre l’apparition officielle de la datation anno domini et son application.
•Curieusement, c’est le moine Bède le Vénérable qui, du fin fond de son monastère anglais popularise l’ère dionysienne, et non la papauté à Rome.
•D’autre part, Bède le Vénérable ne relie jamais anno domini et ère chrétienne.
•Il est conventionnellement admis que les Romains n’utilisaient pas de calendrier des années, du moins jamais sous l’appellation Ab Urbe Condita.
•L’année 730 du calendrier chrétien ne correspond à rien, mais l’année 730 du calendrier romain correspond bien au début de l’Empire romain d’Auguste.
•Les Romains ne pouvaient dater correctement la fondation de Rome avant les travaux de Varron et de Tite-Live, par ailleurs les historiens officiels d’Auguste.
•L’Empereur Septime Sévère se fait couramment appeler dominus noster à une époque où justement l’anno domini se répand, si nous superposons les calendriers romain et chrétien.
•La datation Jesu Christi apparaît près de 450 ans minimum après l’invention de l’ère chrétienne par Denis le Petit, et près de 300 ans après l’apparition de la datation anno domini.
•Les églises romanes conserveraient le culte de Constantin près de... 800 ans après sa mort.
•Les croisades sont bien une aide à l’Empire romain d’Orient, toutes époques confondues.
•Les pèlerinages, ou voyages, en Orient peuvent bien coïncider avec le déplacement de la capitale de l’Empire et de l’Empereur à Constantinople, si nous superposons les calendriers romain et chrétien.
•Théodose lance les inquisitions et les hérésies. Il serait très étonnant que cette période dite de lutte contre le paganisme se soit étalée sur plus de... 1000 ans.
•Rome, la capitale de l’Empire, aurait végété sur elle-même pendant près de... 900 ans.
•Denis le Petit se réfère aux anno diocletiani pour calculer son anno domini, et jamais à l’ère romaine.
*L’ère romaine Ab Urbe Condita apparaît en 1430 suite aux recherches du pape Martin V et de ses secrétaires-archéologues.
•Ce sont ces mêmes secrétaires-archéologues des papes romains qui inventent le Moyen Âge.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, il nous faut désormais envisager la possibilité qu’il existe bel et bien une énorme erreur d’interprétation dans la datation et qu’anno domini se rapporte en fait l’ère romaine. L’ère Ab Urbe Condita et anno domini seraient donc les mêmes. Nous aurions donc 753 ans en trop dans notre calendrier et nous serions donc bien en 2010 après la fondation de Rome et 1280 ans après la fondation de l’Empire romain par Auguste ! Nous vivrions donc en 2010 après Romulus et dans l’Empire romain du XXIème siècle...
Je vous conseil la lecture de ce livre :"Où est donc passé le Moyen-Age ?" Vous pouvez le trouver ici: Où est donc passé le Moyen-Age ?
Cette thèse rejoint les travaux de recherche historique de Garry Kasparov le champion du Monde des échecs de 1985 à 2000.
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